Taupes : menez la contre-offensive

Il faut bien l’avouer, les taupes ne sont pas franchement nos copines. Quand elles transforment une pelouse en véritable champs de manœuvre, il y a de quoi s’énerver. Mais avant de passer à l’action, voilà ce qu’il faut savoir.

La taupe est-elle bien hémophile et aveugle ?
Non, bien sûr ! Comment une taupe qui vit sous la terre pourrait-elle souffrir d’une incapacité à cicatriser rapidement alors même qu’elle se blesse souvent en se faisant de nombreuses petites coupures ? Certes, elle a une masse sanguine importante par rapport à son poids mais avec une coagulation parfaitement normale. Cette prétendue hémophilie est sans doute l’idée reçue la plus tenace sur les taupes. Il est donc inutile de glisser des morceaux de verre ou des rameaux épineux dans l’espoir d’en finir avec cet animal. Par ailleurs, la taupe n’est pas aveugle. Certes, elle dispose de très petits yeux d’une efficacité franchement modeste, mais on nous assure que l’animal distingue fort bien la lumière de l’obscurité.

La taupe mange-t-elle les racines des cultures potagères ?
Non ! La taupe est une vrai carnivore qui se nourrit exclusivement de lombrics, vers, limaces et autres larves variées. Dévorer les racines des salades ou les tubercules et raves enterrées ne l’intéresse pas du tout. En revanche, c’est une grosse mangeuse qui doit engloutir la moitié de son poids chaque jour. Du coup, elle cavale dans ses galeries, creuse de nouveaux boyaux et ne manque pas de tout renverser sur son passage. Evidemment, dans un potager bien soigné, la terre est ameublie, facile à déplacer, régulièrement amendée, fertile et les lombrics y sont en grand nombre. Du coup, c’est un terrain de jeu très apprécié des taupes même si elles ne visent pas directement les cultures potagère.

A-t-elle vraiment un flair exemplaire ?
Oui, c’est vrai, et c’est même l’un de ses principaux atouts. Grâce à ce flair elle détecte, malgré la terre, les odeurs les plus ténues.  Par exemple, un piège posé à mains nues dans une galerie sera très vite repéré. Il faut donc frotter ses mains avec de la terre, soit porter des gants qu’on frotte avec de la terre, pour éloigner toute odeur d’humain.

Faut-il ouvrir une taupinière ?
Oui. C’est même la première chose à faire systématiquement car la taupe a horreur du jour et de l’air. Commencez par araser la taupinière en récupérant la terre émiettée (elle peut être mise dans un massif ou mélangée à un terreau). Ensuite, élargissez bien le trou de sortie. Vous  pouvez attendre quelques instants muni d’une bêche. Il n’est pas rare que la taupe apparaissent pour boucher l’orifice. Si vous êtes rapide, vous pouvez vous en débarrasser. Mais de toutes façons, plus vous dérangez la taupe, plus celle-ci aura tendance à s’éloigner.

Chasser la taupe par inondation est-il efficace ?
Oui, même si les résultats ne sont pas toujours constants. Une fois la galerie ouverte, approchez le tuyau d’arrosage tout en gardant le manche d’une bêche dans une main. Versez un bon jet d’eau mais pas trop violent pour ne pas détruire la galerie. Si la taupe est dans les parages, elle va surgir et il vous restera à entrer en action très vite. En revanche, si elle est assez loin, elle sera au moins découragée de venir dans cet endroit.

L’euphorbe et le sureau sont-ils des recettes de bonne femme ?
Non, si par le terme de « recettes de bonne femme » vous pensez aux solutions fantaisistes dont les effets restent à prouver. La fameuse euphorbe dite épurge ou herbe à taupes (Euphorbia lathyris) n’est pas forcément efficace par sa seule présence en bout de parcelle de potager. En revanche, 400 g de feuilles de cette plante mis à macérer dans 5 litres d’eau durant 3 jours donnent une solution à filtrer dont l’efficacité est reconnue par les spécialistes. De la même façon, on peut faire macérer 1 kilo de feuilles fraîches de sureau noir grossièrement hachées dans environ 10 litres d’eau de pluie durant 4 à 5 jours. On filtre la solution et on la verse autour de la parcelle à protéger. Enfin, le tourteau de ricin, autre produit totalement naturel, aurait des effets répulsifs sur les taupes. Mais là encore, la persévérance est la vraie clé.

Le bon vieux piège n’est-il pas la solution ?
Oui, c’est incontestablement une solution. Cependant, elle a l’inconvénient d’être radicale en tuant l’animal, ce qui n’est pas le but recherché. De plus, la manipulation de cet engin est dangereuse pour celui qui le découvre pour la première fois. Portez absolument des gants, pour masquer votre odeur, mais surtout pour vous protéger les mains. Enfin, il faut une certaine habitude pour ouvrir une galerie sans l’effondrer, placer le piège dans le bon sens, le recouvrir sans l’enterrer et le baliser sans se faire repérer. Taupier était un métier qui exigeait un vrai savoir-faire.

La taupe est-elle vraiment perturbée par des vibrations ?
Oui, du moins plusieurs spécialistes l’affirment. Ce ne serait pas tant sons ouïe que son sens tactile très développé qui lui permettrait de capter des vibrations dans la terre et de les distinguer. Ainsi, la taupe percevrait la présence d’un lombric à proximité et serait incommodée par une vibration émanant de la surface. Du coup, certains plantent en terre des tiges filtées assez souples qu’ils coiffent d’une bouteille en plastique. Celle-ci étant très légère, une simple brise suffit à l’agiter sur sa perche métallique et donc à émettre ces vibrations si dérangeantes. Là aussi, les résultats sont en majorité très positifs même si parfois on fait chou blanc. En tout cas, c’est simple à faire, ça ne coûte rien, ça ne détruit pas le jardin et ça en tue pas la taupe.

 

Faites vos semis de panais

Curieusement on retrouve plus souvent ce légume sur les étals des marchés que dans les potagers. Pourtant il est facile à cultiver et très apprécié des gourmets. À votre tour, essayez le panais en vous lançant dès février.

 

Vive l’hiver, belle saison où le panais est présent dans nos cuisines et sur les étals de nos marchés. Ce légume constitue une savoureuse alternative aux navets, carottes et autres légumes de saison. Facile à cultiver, simple à récolter et délicieux sur la table en version crue ou cuite, salée ou sucrée, voici l’occasion de s’ouvrir à des saveurs anciennes et qui reviennent sur le devant de la scène. Le panais (Pastinaca sativa) est originaire du bassin méditerranéen. Il était déjà bien connu des Grecs et des Romains. Aliment de base au Moyen-âge, le panais fut éclipsé par l’arrivée de la pomme de terre. Mais fort heureusement, avec le regain d’intérêt pour les légumes oubliés, le panais est à nouveau cultivé et apprécié pour ses qualités réelles d’aliment-santé.

 

Il faut bien préparer la terre avant de semer

Le semis de panais s’effectue de février à juin mais doit être commencé sous abri tant que subsiste encore des risques de gelées. Une fois le spectre de gel écarté, on peut semer directement en place. Le semis en terre doit se faire dans un sol très léger ou consistant mais allégé avec du sable. Notez qu’il est conseillé de faire tremper les graines deux ou trois heures avant de les semer pour les «réveiller». Cela permet d’obtenir une levée plus stable et plus rapide. En février et même en mars, il faut couvrir votre semis avec un voile d’hivernage ou mettre en place un tunnel. Pour s’épanouir, le panais préfère les terres profondes, plutôt fraîches et riches. N’hésitez-pas à améliorer votre sol en enfouissant à l’automne un fumier bien décomposé. Si vous ne l’avez pas fait, apportez un compost deux à trois semaines avant le semis et brassez bien en profondeur en passant le motoculteur. Si vous ne disposez pas de ce type de machine, brassez à la fourche bêche pour ameublir le sol sur 20 à 30 cm. Finissez en ratissant bien afin d’éviter les racines fourchues ou déformées. Ensuite vous pouvez tirer des traits (ou sillon) d’environ 1 cm de profondeur. Espacez chaque trait d’une trentaine de centimètres. Si votre terre est naturellement lourde et même si vous l’avez allégée avec du sable, il est plus prudent de monter des billons (rangs surélevés sur lesquels on sème) qui favoriseront l’écoulement des eaux de pluie. La levée proprement dite prend entre 12 et 15 jours selon la température de la terre. Puis, lorsque les pousses seront suffisantes, vous devrez éclaircir à 15 cm.

 

Des bons amis et des moins bons voisins

Afin d’améliorer la récolte et la qualité même de vos panais, vous pouvez essayer de soigner le voisinage que vous leur réservez. Attention, au potager le panais aime particulièrement la proximité des choux, des radis, des oignons, des haricots et des fèves, mais aussi des salsifis. D’ailleurs, panais et salsifis se sèment en même temps et ont une durée de culture similaire. À l’inverse, il redoute la présence trop proche des laitues et surtout des fenouils.

 

Entretien simple mais utile

Le panais ne réclame pratiquement aucun entretien, comme pour toutes les cultures, vous devrez simplement sarcler et biner de temps en temps pour aérer la terre. C’est l’occasion aussi de faire un désherbage régulier. Les besoins du panais en eau sont assez importants. Il est donc nécessaire d’arroser avec régularité tout au long de l’été pour garder le sol juste frais mais aussi de se méfier des sécheresses de printemps. Attention, arrosez au goulot (arrosoir sans pomme) doucement et sans mouiller les feuilles.

 

Une rotation nécessaire

Évitez de cultiver le panais au même endroit que l’année précédente. Nous vous conseillons de laisser passer au moins trois ans (voire quatre). Une bonne rotation des cultures permet de ne pas vider la terre des mêmes éléments nutritifs et réduit les risques de parasites. L’idéal est de semer les panais sur une planche ayant été occupée la saison précédente par des légumes fruits comme les tomates ou les aubergines. Le panais, légume racine, plongera plus en profondeur pour trouver les éléments nutritifs qui lui sont nécessaires tout en aérant la terre.

 

La récolte et le stockage

La production moyenne du panais est d’environ 6 à 8 racines par m linéaire. La récolte s’effectue environ 4 à 5 mois après le semis. En étalant les semis de février à mai on peut donc étaler les récoltes de juin à octobre et même fin novembre. Pour ce qui est de l’arrachage, soyez prudent en plongeant la fourche-bêche à 20 cm du plant pour ne pas blesser les racines. Notez que les panais résistent bien au froid et qu’ils peuvent donc passer une bonne partie de l’hiver en terre. Ils stoppent alors leur maturation et peuvent être récoltés au fur et à mesure de vos besoins. Certains prétendent même que le gel apporte de la douceur au panais… Comme la plupart des légumes racines, les panais sont faciles à conserver, aussi bien en terre qu’une fois récoltés. On peut les stocker dans des cagettes, au frais, à l’abri de la lumière dans un lieu sec et aéré. L’idéal est de les mélanger avec du sable, ce qui améliore encore les conditions de conservation.

 

D’excellentes propriétés nutritionnelles

Le panais est une bonne source de fibres, il est également riche en minéraux (manganèse, phosphore, magnésium, potassium…). Pour en profiter au maximum, le mieux est de le consommer cru (par exemple râpé en salade). C’est délicieux. Ce légume est aussi riche en vitamine B9, laquelle participe à la fabrication des cellules du corps et des globules rouges. Il affiche aussi une belle teneur en vitamine C et en vitamine E qui est un antioxydant majeur.
Attention toutefois à sa teneur en glucides, que les personnes diabétiques ou hypoglycémiques doivent considérer. Pour 100 g de panais cru on compte 1,4 g de protides, 1,6 g de glucides et   0,5 g de lipides. Régalez-vous !

François Willemin

 

 

 

 

Au sommaire du Jardin pratique n° 208

A la une de ce numéro : « La pleine floraison des camélias », un dossier sur les plantes invasives, les semis de tomate, la lutte contre les taupes et toujours d’autres conseils et astuces.

Vous trouverez votre magazine chez tous les bons marchands de journaux et sur notre boutique.
Bonne lecture.

Sommaire :

Du jardin à la table : cuisinez les kiwis
Les invasives : gynérium et mimosa
Kiwis
Sauges
Association : clématite « Avalanche » et rosier « Lutea »
Memento
Pulmonaires
Semez les tomates
Les cendres de bois
Astuces
Le sénéçon
Les taupes
Geste pratique : transplanter les rosiers
Le panais
8 questions sur… l’art de blanchir à la chaux les arbres fruitiers
Saxifrages fortunei
Dahlia
Le lilas des indes
Rosier raubritter
Camelia japonica
Courrier